Sénégalissimo


L’ordre des choses
mercredi, 24 juin 2009, 16:43
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Saint-Jean, fête nationale du Québec sur williamontreal.blogspot.com

Saint-Jean, fête nationale du Québec sur williamontreal. blogspot.com

En ce jour de Saint-Jean, j’ai inversé l’ordre des choses cette année : je viens de terminer mon déménagement… et je célébrerai ma fête nationale du Québec au cercle du Mess des officiers français le jour de la fête du Canada en compagnie de Québécois expatriés à Dakar.

Me voilà donc dans un nouveau quartier, Sicap Baobab. Développé dans les années 70, les Dakarois ont d’abord rechigné à s’y installer, parce qu’on le jugeait trop excentré. Comme dans le quartier voisin (Sicap Karak), ce sont les Capverdiens qui y sont venus les premiers. Avec l’étalement urbain et l’érection d’un nouveau centre d’affaires du côté des Almadies, les appartements des Sicap sont maintenant recherchés parce qu’on y trouve un accès rapide aux zones stratégiques, la sécurité, une forme de vie communautaire à mi-chemin entre le grouillement des quartiers populaires et l’anonymat des quartiers résidentiels chics, la tranquillité et des conditions d’hygiène acceptables.

Des Sénégalais y ont construit des maisons auxquelles ils ont progressivement ajouté des étages qui, mis en location, sont maintenant source de revenus. Nous venons de louer la moitié d’un de ces étages, Professeur de wolof (mon colocataire) et moi, à l’instar d’autres tubaabs et jeunes professionnels travaillant à Dakar. Résultat : le quartier est caractérisé par une agréable mixité ; une espèce de Villeray dakarois…

Sunu kër (Notre maison)

Notre appartement, la moitié du deuxième étage d’une construction des années 70,  se trouve dans une villa « d’angle ». Trois de ses murs comportent des fenêtres qui, lorsqu’elles sont ouvertes, lui procurent une aération qui n’a rien à envier à l’action conjointe de trois ou quatre ventilateurs. Avec ses trois chambres, il nous permettra d’accueillir confortablement parents et amis. Nous nous réjouissons aussi de la grande terrasse sur le toit,  sur laquelle on compte se faire un petit coin d’ombre pour profiter des grands vents par temps chaud.

Sunu gox (Notre quartier)

À la différence de mon ancien quartier, la Zone A, Sicap Baobab est parsemé de petits bars où on peut tranquillement boire un verre en mangeant des brochettes et du dibi (viande grillée). Ça me réjouit, entre autres pour Ami français qui, lorsqu’il me visitait à Montréal, avait pris l’habitude d’attendre mon retour du travail au bar du coin. J’ai trouvé pour lui un endroit, le Ngonnal (littéralement, « la veillée »), où il pourra tranquillement siroter une bière, bouquiner et papoter… Il y trouvera aussi les poissons que nous ferons griller le soir, ramenés par les pêcheurs qui y vendent les prises du jour.

Par ailleurs, j’ai été ravie de découvrir, dans la cour d’une maison voisine, un petit comptoir où’on vend fatayas et beignets. Vers 18 h, tous les jours, une dizaine de personnes font la queue pendant qu’on prépare pour eux, à la minute, dans une marmite d’huile bouillante, des chaussons à la viande et au poisson et des boules de pâte de blé sucrée. Aussi ravie de repérer, à 100 m de la maison, une petite laiterie qui vend lait caillé, yaourt et oeufs.

Sympa, notre quartier…

Taw bi (La pluie)

Hier, à 21 h 30, mon colocataire m’a arrachée à ma nostalgie de Québécoise de l’autre côté de l’Atlantique un 23 juin : « Ça sent la pluie. » Si au sud comme au nord plusieurs régions du Sénégal avaient déjà reçu leurs premières gouttes, à part le sable, rien ne m’était encore tombé dessus à Dakar.

Vent fort, irrégulier, humide, chargé ; ciel lourd. En effet, ça sentait la pluie. Dix minutes plus tard, elles tombaient, les cordes, pendant au moins une demi-heure. On a fermé les fenêtres côté vent et admiré le spectacle : des enfants sautaient dans les flaques, euphoriques ; l’eau coulait en trombes des tuyaux d’évacuation reliés aux toits et aux galeries des villas voisines ; les passants surpris passaient au pas de course. Les éclairs et le tonnerre ont fini par convaincre petits et grands de se réfugier à l’intérieur.

La pluie s’est arrêtée. L’eau a mis un peu de temps à s’écouler. Les gens n’ont pas remis le nez dehors, n’ont pas repris la rue d’assaut. C’était calme, comme un dimanche matin après une grosse bordée de neige. Hier soir, les buveurs de thé ont boudé le trottoir, me laissant paisiblement trouver le sommeil.

Alors que d’habitude, jour de Saint-Jean,  je prie déjà depuis une semaine pour accueillir à la campagne, chez mes parents, sous un ciel étoilé et sans nuage, mes amis, leurs tentes et un grand feu de joie, cette année, je me réjouis de l’averse que j’aurais voulue plus longue. Ce soir, pour calmer mes blues, devant un petit fleurdelisé battant dans le courant d’air de mon appartement, je me concocterai un programme musical à base de Leclerc, Moffatt, Ferland, Bélanger, Piché, Vigneault, Forestier, Lapointe, Dumas, Tremblay. La boucle du solstice bouclée, du léger chaos des derniers jours émerge un nouvel ordre des choses, celui qui rythmera les deux prochaines années que je passerai en grande partie ici, à Sicap Baobab.

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Un commentaire so far
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« St-Antoine » fut bien tranquille à la St-Jean. Ce fut notre nostalgie à nous. Par ailleurs nous avons savouré la participation de Kabakuwo au spectacle Création plurielle dans le Vieux Port de Montréal. Tu aurais apprécié la belle température pour ce 24 juin. Nous aurons peut-être la chance de connaître ton nouveau quartier. Tu nous donnes le goût d’être là!…

Commentaire par Angèle -Jean-Guy




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