Baal ma, Baaba Maal

Baal ma, Baaba Maal

dimanche, 5 avril 2009, 23:11
Filed under: culture, Musique, Sénégal | Étiquettes: baaba maal, culture, Musique, Sénégal, toucouleur

Au centre, Baaba Maal ; à gauche Mansour Seck

Un ami haalpulaar originaire de la ville de Podor dans le Fuuta Toro, une région située au nord du Sénégal, m’a parlé de Baaba Maal quelques jours après mon arrivée à Dakar. J’avais l’impression qu’on me décrivait un demi-dieu. J’ai trouvé ça louche et j’ai oublié son nom…

Un mois plus tard, j’ai croisé la route d’un Toucouleur. Est-ce ma curiosité naturelle ou l’impression laissée par la noblesse de son discours et la beauté de ses traits enveloppées dans un grand boubou blanc qui m’ont poussée à en savoir davantage sur les Toucouleurs ? Un peu des deux.

Quoi qu’il en soit, au fil des recherches et des rencontres qui m’ont permis de distinguer les Peuls du Fuuta-Djallon, du Sine-Saloum et du Fuuta-Toro, je suis à nouveau tombée sur Baaba Maal. J’ai ensuite vu son nom dans le programme de l’Institut français… et j’ai décidé d’aller à la rencontre de l’Icône musicale toucouleur.

Mardi 31 mars, 21 h, dans les estrades de l’Institut français Léopold Sedar Senghor. Collègue française, voisin sénégalais et moi attendons l’arrivée de Baaba Maal.

Mon voisin trouve dommage que le coût du billet soit démesuré pour un grand nombre de Haalpulaars qui, autrement, n’auraient pour rien au monde raté ce concert. La proportion d’expatriés dans les estrades lui donne raison.

Les lumières s’éteignent. Il arrive. Baaba Maal. Immense sur scène, dans un grand boubou blanc, magnifique. J’ai ensuite aperçu Mansour Seck, solide comme un baobab, les deux pieds plantés dans le sol, l’assurance tranquille de ceux qui ont vu le monde. Ce n’est qu’en deuxième partie que j’ai remarqué sa cécité, alors qu’on lui a pris le bras pour le mener auprès des choristes qui venaient de monter sur scène. Il y avait aussi le guitariste Mamadou Gaye qui, dès les premières notes, s’est démarqué avec un son folk rebondissant et précis, comme je l’aime profondément.

Dans la salle, certains spectateurs applaudissent. On leur chuchote des mots à l’oreille, leur réclame des traductions. Devant, à côté, derrière, les histoires de pêche et de pêcheurs, de béliers à six cornes et autres fragments de sens circulent et me parviennent en français, en wolof et en anglais par la magie d’un téléphone arabe diffus, solidaire. Les Haalpulaars qui sont là sont fiers, fiers et heureux.

Le xalam et les cris du coeur de Mansour Seck font contrepoids à la guitare du grand Gaye et à la voix de Baaba Maal qui s’envole ; s’empare de l’espace, résonne, souveraine, dans mon ventre. Une première moitié de concert empreinte de volupté ; de plaisirs mélomanes. Que du bonheur !

Aux voix, bassiste, guitariste, joueur de batterie, percussionniste, joueur de xalam et choristes déjà sur scène s’ajoutent, dans la seconde moitié du concert, de nouveaux musiciens. Clavier, sabars, tama, une guitare en plus, quelques voix, danseurs et danseuses annoncent un changement de ton. En moins de deux, on est passé de l’intimité majestueuse à la grande fête. Crescendo, jusqu’à la fin.

Malgré tout mon amour de la danse et du carnavalesque, je dois le reconnaître, rien ne m’a fait plus plaisir que la première moitié du concert, intimiste sous le ciel étoilé d’une nuit dakaroise ; que la voix limpide de Baaba Maal sur fond de cordes pures et de percussions… enveloppée dans un grand boubou blanc.

S’il n’est pas un demi-dieu, il pourrait facilement se faire passer pour l’un d’eux. Moi qui ai trouvé ça louche, qui ai douté de sa grandeur, à l’Icône je présente des excuses. Baal ma, Baaba Maal.

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